3 avril 1968
(Suite de la conversation du 20 mars 1968, à propos de l'homme de la Curie romaine.)
Tu as revu P.L.?
Non.
Je l'ai vu hier.
Il m'a parlé, mais je n'ai pas entendu. Je ne sais pas ce qu'il m'a dit. Mais j'ai eu très fortement – très fortement, et ça a duré longtemps – l'impression du début, du commencement... du départ de quelque chose comme une action ou une série d'événements qui avaient une grande importance pour le développement de la terre1. Très fort: c'est resté pendant des heures, cette impression. Et c'est tout à fait inaccoutumé pour moi parce que, généralement, les choses extérieures... (Mère hoche la tête), tout cela est tellement relatif et tous les événements sont tellement relatifs que ça ne laisse pas d'impression.
Tout à fait inhabituel. Et inattendu.
C'est comme une porte qui s'ouvre sur quelque chose qui aura une importance assez considérable dans le développement terrestre.
Je n'avais pas l'impression qu'il fût conscient lui-même... Ça dépassait un peu les consciences humaines. Mais j'ai vu très clairement, j'ai vu très clairement le pape.
Il a décidé d'aller à Rome?
Oui, dès en arrivant, il demandera une audience.
C'est tout à fait (pendant des heures, c'est resté), tout à fait inaccoutumé: quelque chose qui dépasse de beaucoup les individualités humaines, mais qui était le commencement d'une chose très importante dans l'histoire de l'évolution terrestre.
La dernière fois que je l'ai vu, il m'a demandé comment procéder
1. Il semblerait que ce soit la suite ou la concrétisation du mouvement qui avait commencé en 1967 avec la note de Mère: «Le christianisme déifie la souffrance pour le salut de la terre» (29 juillet 1967), puis les visites de Mme Z qui prétendait faire un rapprochement entre l'Église et l'Ashram, puis la visite du moine qui voulait élargir son christianisme avec la Vérité nouvelle (voir Agenda VIII).

 

pour se faire recevoir par le pape. Alors je lui ai dit: «C'est très simple, c'est le nom de Sri Aurobindo qui vous ouvrira la porte; vous écrirez au pape: je viens de l'Ashram de Sri Aurobindo et je voudrais vous voir.»
(Mère entre dans une longue concentration)
C'est étrange, une étrange sensation... Tu sais, comme quand on tourne une page. Depuis hier et en ce moment, c'était tellement fort: l'impression de quelque chose qui a fait comme cela (geste comme une page qui tourne) et puis ça, c'était le commencement. Et n'est-ce pas, rien dans la tête, pas une pensée, rien: seulement une espèce de perception que quelque chose a fait comme cela (même geste) et...
Il faudrait noter la date – peut-être que dans dix ans ou vingt ans, on comprendra!
Hier, c'était le deux avril, oui, le deux. C'était une date étrange: c'est 2-4-6-8. Hier. Deux, quatre, six, huit. Et l'impression, c'est quelque chose qui a fait comme cela, comme une page qui est tournée, et puis... le commencement. Ou si tu veux (ce n'est pas une sensation géométrique mais...), l'impression d'une courbe qui est terminée et d'une autre qui commence. Mais ce n'est pas si bien que cette image comme d'une immense page qui retombe, et puis quelque chose qui commence. C'est blanc, c'est... c'est juste le commencement.
Et aucune perception d'une chose personnelle: les personnalités (P.L.) sont seulement comme des pions qui ont servi à commencer, c'est tout. Le mouvement, l'origine du mouvement est infiniment plus haute et plus vaste que toute personnalité physique.
Vraiment, la perception que tous les gens et toutes les choses ne sont que comme des pions, comme cela (geste sur un échiquier), qui sont mis en mouvement, mais...
On verra.
Il faut noter ça.
Ça a quelque chose à voir avec le pape tout de même? Oui. Avec la Chrétienté.
(Mère entre à nouveau dans une longue contemplation)

 

Depuis hier (ça n'avait pas l'air d'être en relation avec la première expérience), mais toute la journée, ma façon de réagir (intérieurement, pas extérieurement), ma façon de réagir vis-à-vis des choses, ma façon de voir toutes les choses matériellement: complètement changée. Et c'était comme s'il y avait une nouvelle personne... qui s'étonnait même des anciennes réactions, qui se demandait: «Comment? je réagissais comme cela! (le corps, n'est-ce pas). Maintenant ce n'est plus ça.»
Et maintenant, c'est encore très fort, comme si... pas une nouvelle personnalité, mais une nouvelle manière d'être était là. Et pas personnelle: c'est comme un grand courant.
C'est très-très curieux.
J'ai eu trois jours très-très difficiles, très difficiles, même dangereux, et puis avec un raidissement de la volonté et comme un travail très actif de surrender de toutes les cellules, ça a abouti hier à cela.
Très bizarre, très bizarre1.
On verra! (Mère rit)
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